Contrat de travail
Fixer les objectifs : une liberté encadrée
Dans nombre d'entreprises, c'est en début d'année que les objectifs sont définis. Pour certains salariés, ils conditionnent le versement de la part variable de rémunération ou d'une prime. Si la fixation des objectifs est une prérogative de l'employeur, certaines règles doivent être respectées.
Choisir les salariés concernés
Pas de restriction selon les salariés. - L'employeur est en droit de fixer des objectifs pour une ou plusieurs catégories de salariés seulement (ex. : commerciaux, cadres dirigeants) ou pour tous les salariés.
Peu importe la nature du contrat ou la durée de travail des salariés. Qu'ils soient en CDI ou en CDD, à temps plein ou temps partiel, l'employeur peut leur fixer des objectifs, sous réserve de les adapter si nécessaire.
Tenir compte des situations individuelles. - L'employeur ne peut pas fixer les mêmes objectifs à tous les salariés. Il doit tenir compte de leurs compétences et de leur expérience, de leur temps de travail en cas de temps partiel (cass. soc. 4 décembre 1990, n° 87-42341, BC V n° 605).
Si un salarié possède un mandat syndical ou d'élu du personnel, l'employeur doit réduire ses objectifs à due proportion de son temps de production, sous peine d'être condamné pour discrimination syndicale (cass. soc. 6 juillet 2010, n° 09-41354, BC V n° 157).
Déterminer les objectifs
Des règles s'appliquent, quel que soit le mode de fixation des objectifs.
Objectifs quantitatifs et/ou qualitatifs. - L'employeur peut fixer des objectifs quantitatifs (ex. : chiffre d'affaires à atteindre, nombre d'appels téléphoniques, nombre de rendez-vous commerciaux). Il peut également prévoir des objectifs qualitatifs (ex. : améliorer le service client, développer la notoriété de l'entreprise, créer un nouveau produit).
Objectifs individuels et/ou collectifs. - Les objectifs fixés au salarié peuvent être individuels. Il est également possible de les combiner avec des objectifs collectifs, pouvant prendre la forme :
-d'objectifs assignés à un groupe de salariés, comme un niveau de résultats à atteindre par un service (cass. soc. 9 février 2011, n° 09-42290 D) ;
-d'objectifs liés aux performances de l'entreprise (cass. soc. 8 juillet 2020, n° 19-10901 D).
Objectifs réalistes et adéquats. - Les objectifs fixés au salarié doivent être réalistes (cass. soc. 13 mars 2001, n° 99-41812, BC V n° 86). Cela signifie qu'ils doivent être raisonnables et compatibles avec le marché (cass. soc. 13 janvier 2009, n° 06-46208, BC V n° 12).
L'employeur doit aussi tenir de compte de certains « paramètres » comme :
-la marge de manœuvre du salarié (cass. soc. 3 février 1999, n° 97-40606, BC V n° 56) ;
-ses résultats antérieurs et ceux de ses collègues (cass. soc. 23 février 2000, n° 98-40482 D) ;
-l'éventuel besoin de conseil et d'accompagnement du salarié sur le terrain (cass. soc. 16 mai 2018, n° 16-25689 D) ;
-le secteur géographique sur lequel le salarié intervient et la taille de son équipe (cass. soc. 7 mars 2018, n° 16-21588 D).
Formaliser les objectifs
Principe : formalisme libre. - Sauf dispositions conventionnelles, aucun formalisme n'est imposé. L'employeur peut notifier les objectifs dans le compte rendu de l'entretien annuel, une lettre de mission ou une clause du contrat de travail, en particulier s'ils conditionnent le montant de la part variable de rémunération ou le versement d'une prime.
À noter
Certaines conventions collectives imposent de fixer les objectifs dans une clause du contrat (ex. : convention collective de la coiffure).
En français. - Le document qui fixe les objectifs doit être rédigé en français, sauf s'il est adressé à un salarié étranger (c. trav. art. L. 1221-3 et L. 1321-6). Ainsi, une clause d’objectifs peut être rédigée en anglais pour une salariée citoyenne américaine (cass. soc. 24 juin 2015, n° 14-13829, BC V n° 128). En revanche, le fait que l'entreprise ait une activité internationale n'autorise pas à communiquer les objectifs uniquement en anglais (cass. soc. 3 mai 2018, n° 16-13736 D).
En cas de clause contractuelle. - Deux modalités sont envisageables.
Soit la clause du contrat prévoit que les objectifs sont définis et révisés unilatéralement par l'employeur. Ce dernier doit les communiquer au salarié en début d’exercice (cass. soc. 2 avril 2014, n° 12-29381 D), sauf circonstances particulières l'en empêchant (cass. soc. 21 septembre 2017, n° 16-20426, BC V n° 147). En cas de retard non justifié, le salarié peut réclamer le montant maximum du bonus (cass. soc. 25 novembre 2020, n° 19-17246 D).
Soit la clause du contrat prévoit que les objectifs sont fixés d'un commun accord avec le salarié et revus selon une certaine périodicité. L'employeur doit alors engager la négociation selon la périodicité prévue, sous peine de devoir payer la totalité du bonus (cass. soc. 4 novembre 2021, n° 19-21005 D). Si aucun accord sur les objectifs n'a été trouvé, le montant du bonus est fixé par le juge par référence aux années antérieures (cass. soc. 13 juillet 2004, n° 02-14140, BC V n° 208).
Clause d'objectifs
1/ Objectifs définis unilatéralement par l'employeur
M. est tenu de réaliser tous les… (périodicité) un chiffre d'affaires minimal d'un montant de… euros, hors taxes.
Chaque… (périodicité), la société… révisera ce chiffre en fonction de… (indiquer les critères). La société… en informera le salarié le… (date de début d'exercice).
La réalisation des objectifs donnera lieu au versement d'une prime calculée de la façon suivante : Cette prime sera versée… (date de versement).
2/ Objectifs négociés entre l'employeur et le salarié
M. est tenu de réaliser tous les… (périodicité) un chiffre d'affaires minimal d'un montant de… euros, hors taxes.
Chaque… (périodicité), ce chiffre sera révisé en fonction de l'évolution des prix et après accord des parties. Il donnera lieu à un avenant au contrat de travail.
La réalisation des objectifs donnera lieu au versement d'une prime calculée de la façon suivante : Cette prime sera versée… (date de versement).