A la rencontre
Quand nos salariés sont aussi des aidants
Christine Lamidel
Directrice générale fondatrice
Tilia
https://tilia-aidants.fr/
Une personne sur cinq aide un proche de manière régulière et fréquente pour les tâches du quotidien (observatoire Cetelem/Harris Interactive). Quand ils sont salariés, paradoxe, ils s'ouvrent peu de leur situation malgré leurs attentes vis-à-vis de l'entreprise. Comment les RH peuvent agir ?
Écoutez l'interview dans son intégralité sur RF Play (https://bit.ly/3WJQGS3).
Difficile d'être aidant
« Les aidants ne sont pas toujours visibles, pourtant ils sont des millions, et de plus en plus nombreux dans l’entreprise avec cette double activité, parfois une double journée s'ils se rendent chaque soir chez leur proche fragilisé. Ils rencontrent des difficultés de plusieurs ordres comme le manque de temps, le poids financier et des problèmes de santé.
Même si le rôle d’aidant est un sujet de la sphère privée, il interfère dans la vie professionnelle et pourtant les aidants s'en ouvrent peu dans l'entreprise. Plusieurs facteurs expliquent ce silence. Déjà, 2/3 des aidants ne se reconnaissent pas dans ce statut. Ils prennent soin de leur proche naturellement : un père, une mère s'occupe de son enfant, un enfant s'occupe de ses parents. Ils ne se manifestent donc pas comme salariés aidants auprès de leur employeur pour bénéficier des aides auxquelles ils sont éligibles. Et il y a la peur d’être stigmatisés, mis de côté pour une évolution professionnelle, de voir leur carrière ralentie. Les aidants ne veulent pas être perçus comme moins disponibles ou engagés.
Alors l'aidant se tait alors que son rôle a un impact sur sa santé physique (TMS, fatigue...) et psychique (RPS, problèmes de concentration…). Et sa situation évolue car son état de santé est corrélé à l’état de santé du proche et à la dégradation de celle-ci. »
Compliqué d'aider les aidants
« Les aidants attendent que l'entreprise les accompagne mais comment peut-elle préserver leur santé physique et psychique sans se montrer intrusive ? L'entreprise qui veut mettre en place des dispositifs pour ses salariés se demande jusqu’où elle doit aller.
Il y a autant de situations que d’aidants mais il peut s'agir de choses simples à mettre en œuvre : aménagement personnalisé de l’organisation du travail (ex. : plus de flexibilité des horaires, télétravail renforcé), adaptation de la charge de travail ou de la mission, mobilité géographique sur un site à proximité du domicile du proche si c'est possible, monétisation du CET… Car il est important de maintenir l'activité professionnelle pour éviter l'isolement, le salarié a besoin de cette bulle sociale qui l'extrait de son rôle d'aidant.
Les RH peuvent sensibiliser les managers à avoir une écoute active des signes d’alerte (ex. : irritabilité, comportements inhabituels, modification d'attitude, signes physiques, fatigue, retards réguliers), à être dans une posture bienveillante et empathique pour aller au-devant des salariés aidants. Si l'entreprise ne peut pas faire pour les salariés, elle peut créer un environnement de confiance et aider à lever le tabou afin qu'ils osent se dire aidants. »