Licenciement
Licencier en respectant sa convention collective
Lorsqu'un licenciement pour motif personnel est envisagé, il faut vérifier si la convention collective n'ajoute pas à la procédure légale de licenciement des formalités particulières. Si c'est le cas, l’employeur doit s'y tenir.
Procédure additionnelle
Une procédure en plus. - Une convention collective ou un règlement intérieur peut prévoir des garanties supplémentaires au profit du salarié licencié pour motif personnel. Cette procédure conventionnelle s'ajoute à la procédure légale, elle ne s'y substitue pas. Ainsi, la comparution du salarié devant un conseil de discipline ne tient pas lieu d'entretien préalable au licenciement (cass. soc. 20 octobre 1988, n° 85-44501, BC V n° 533).
À noter
Un document interne dont l’objet est de diffuser les règles de gestion RH pour harmoniser les pratiques managériales, notamment en matière disciplinaire, ne crée pas de garanties pour les salariés (cass. soc. 27 mai 2021, n° 19-16117 FSP).
La procédure conventionnelle s'impose à l'employeur sauf s'il peut justifier d'une impossibilité matérielle qui ne lui est pas imputable. Ainsi, alors que la convention collective impose la réunion d'une commission, comptant des représentants du personnel (RP), préalable au licenciement, l'employeur peut justifier l’absence de RP, et donc l’impossibilité de réunir la commission, en produisant un PV de carence des élections (cass. soc. 10 décembre 2015, n° 14-16214, BC V n° 253).
Appliquer la bonne procédure. - Les garanties prévues par la convention collective s'appliquent à la seule procédure de licenciement visée, pour motif disciplinaire ou non disciplinaire (cass. soc. 17 décembre 2014, n° 13-22890, BC V n° 301). Ainsi, lorsqu’il envisage de licencier un salarié pour insuffisance professionnelle, l'employeur n’a pas à mettre en œuvre les dispositions conventionnelles visant une procédure disciplinaire (cass. soc. 22 juin 2011, n° 09-42697, BC V n° 164).
Quelles garanties conventionnelles ? - Divers types de garanties conventionnelles existent. Pour un licenciement disciplinaire, il peut notamment s'agir :
-de l'exigence de sanctions préalables (ex : avertissements) à la mise en œuvre du licenciement (cass. soc. 22 juin 2011, n° 09-42697, BC V n° 164) ;
-de l'information préalable des RP (cass. soc. 17 mars 2015, n° 13-24252, BC V n° 49) ;
-d'un délai maximal de notification du licenciement, plus court que le délai légal (cass. soc. 27 mars 2013, n° 11-20737, BC V n° 86).
En ce qui concerne un licenciement non-disciplinaire, il peut s'agir, par exemple :
-en cas d'insuffisance de résultats, de l'organisation d'un entretien afin d'étudier des moyens pour remédier à cette situation (cass. soc. 17 mai 2011, n° 09-72843, BC V n° 109) ;
-en cas d'insuffisance professionnelle, de la recherche préalable d'un poste de reclassement (cass. soc. 17 décembre 2014, n° 13-22890, BC V n° 301).
Informer le salarié des garanties. - La convention peut exiger que le salarié soit informé de l'existence des garanties dont il bénéficie, par exemple dans la convocation à l’entretien préalable au licenciement. L'employeur peut ainsi être tenu de préciser au salarié qu'il peut saisir pour avis une commission paritaire nationale en précisant l’adresse de cette commission (cass. soc. 14 mars 2012, n° 10-24247 D).
Intervention d'un conseil ou d'une commission
Saisine d'une instance. - Une convention collective ou un règlement intérieur peut instituer, en plus de la procédure légale de licenciement, la saisine, par exemple :
-d'un conseil de discipline ou d’une commission d’interprétation et de conciliation (cass. soc. 21 janvier 2009, n° 07-41788, BC V n° 17) ;
-d’une instance consultative chargée d’émettre un avis sur les manquements imputés au salarié et sur la sanction envisagée (cass. soc. 23 mars 1999, n° 97-40412, BC V n° 134).
Cette consultation peut relever de l'initiative du salarié, auquel cas l'employeur doit l'informer de cette faculté, même si la convention collective ne prévoit pas expressément cette information (cass. soc. 31 janvier 2006, n° 03-43300, BC V n° 45).
L'information donnée par l'employeur doit être exhaustive et lister toutes les possibilités de recours offertes au salarié par le texte conventionnel. Il peut devoir préciser au salarié que celui peut saisir pour avis la commission de conciliation de l’entreprise ou, en son absence ou en cas de partage des voix, la commission paritaire nationale (cass. soc. 27 juin 2012, n° 11-14036, BC V n° 198).
Procédure disciplinaire. - En cas de procédure disciplinaire, la notification du licenciement ne peut pas intervenir plus de 1 mois après le jour fixé pour l’entretien [voir Dictionnaire Social, « Licenciement personnel (procédure) »]. La saisine de l'instance consultative interrompt ce délai pendant toute la durée de la saisine (cass. soc. 31 octobre 2000, n° 95-45349, BC V n° 353), à condition que le salarié en ait été informé avant l’expiration du délai (cass. soc. 10 mai 2006, n° 05-43843, BC V n° 171).
Une fois que l'instance a rendu son avis, l'employeur dispose d'un délai de 1 mois pour notifier le licenciement (cass. soc. 4 mai 1995, n° 93-41440 D).
Procédure conventionnelle non respectée : sanctions
Consultation préalable au licenciement non respectée. - Depuis les ordonnances Macron, le non respect de la procédure conventionnelle de consultation préalable au licenciement constitue une simple irrégularité de procédure (ord. 2017-1387 du 22 septembre 2017, JO du 23). L'employeur encourt à ce titre une indemnité plafonnée à 1 mois de salaire (c. trav. art. L. 1235-2 ; cass. soc. 22 septembre 2021, n° 19-21605 FP-B).
Pour les juges, un conseil de discipline, dont le rôle est purement consultatif, ne constitue pas un tribunal au sens de l’article 6.1 de la CESDH de sorte que les dispositions de cet article relatives au droit à un jugement équitable ne lui sont pas applicables. Par conséquent, une irrégularité commise dans la procédure de consultation du conseil ne rend pas nul le licenciement prononcé (cass. soc. 6 avril 2022, n° 19-25244 FB).
Formalité autre que consultative non respectée. - Le code du travail ne donne pas de précision sur la sanction encourue lorsque les formalités conventionnelles, autres que liées à une consultation préalable au licenciement, ne sont pas respectées (c. trav. art. L. 1235-2). Dans des affaires dont les faits étaient antérieurs aux ordonnances Macron, les licenciements prononcés en violation de ces garanties ont été jugés sans cause réelle et sérieuse (cass. soc. 8 septembre 2021, n° 19-15039 FSB ; cass. soc. 6 avril 2022, n° 19-25244 FB).
Ce fut par exemple le cas alors qu'un employeur n'avait pas informé les représentants du personnel préalablement à la mise en œuvre des licenciements disciplinaires, conformément à la convention collective (cass. soc. 17 mars 2015, n° 13-24252 BC V n° 49 ; cass. soc. 17 mars 2015, n° 13-23983, BC V n° 49).
Reste à savoir si la Cour de cassation maintiendra cette jurisprudence ou l'assouplira afin de tenir compte de l'article L. 1235-2 du code du travail dans sa version applicable depuis le 1er janvier 2018.