Management
Remettre de la proximité managériale
La proximité managériale à distance a évidemment une limite physique. Sans se voir, les managers ont dû trouver d’autres solutions pour jouer leur rôle. Ils ont utilisé leur bon sens. Voici quelques outils pour vous aider à recréer cet espace de collaboration entre un manager et ses managés.
Management par objectif expérimenté à distance
Les confinements successifs ont contraint les managers à faire autrement, notamment à manager par la confiance : formuler leurs demandes, fixer le cadre puis laisser de l’autonomie dans la réalisation. Or, selon une enquête BCG-IPSOS de 2019, les managers seraient à bout de souffle (www.ipsos.com/fr-fr/les-managers-francais-sont-bout-de-souffle).
Une nécessité : continuer de s’intéresser au comment. Souvent, quand on fait une demande par e-mail, on considère que ce n’est plus un sujet ayant passé la balle. Pourtant sans suivi, les interlocuteurs ne traitent pas toujours le sujet. Déléguer en confiance n’exclut pas un contrôle pour s’assurer que le sujet est pris en charge. De la même façon, manager par objectif suppose de continuer à s’intéresser aux résultats car il faut en évaluer l’atteinte et la manière de l’atteindre. Ainsi on accompagne ses collaborateurs et on les aide à grandir dans leur métier ou professionnellement. À FAIRE : identifier ce qui a été facile et compliqué, comprendre en détail comment le collaborateur s’y est pris.
Ce type d’accompagnement managérial permet :
-❶ de valoriser les réussites (passer d'une compétence inconsciente à consciente) ;
-❷ d’ajuster les futurs objectifs/missions ;
-❸ de proposer des manières de faire qui pourraient lui faire gagner du temps ou en efficacité.
Pour proposer des dossiers de plus en plus complexes, il faut comprendre ce qui a été simple. En le connaissant mieux et sachant ce qu’il a aimé faire, je peux imaginer de nouvelles mises en situation qui vont permettre à mon collaborateur de progresser.
Une difficulté : doser suivi et accompagnement. En théorie, le management à distance limite le risque de micro-management. Pourtant, certains managers ne réussissent pas à suffisamment faire confiance à leurs collaborateurs. Il leur faut lâcher prise sur le stress ressenti (la plupart du temps face à son propre management) et lutter contre l’idée que cela risque d’être moins bien fait ou moins vite.
Comment savoir si on trouve le bon dosage ? D’abord, il faut savoir que tous vos collaborateurs n’ont pas les mêmes besoins ! Pour simplifier, les plus juniors auront généralement besoin d’un accompagnement rapproché, un suivi étape par étape alors que les plus expérimentés demandent de l’autonomie et de l’espace pour trouver par eux-mêmes les façons de résoudre leurs difficultés. À FAIRE : demander régulièrement à vos collaborateurs si votre niveau de soutien et d’accompagnement leur convient. A minima, au moins 2 fois par an, posez-leur les 3 questions du CCA :
-Que faut-il que je Continue à faire pour t’aider au mieux ?
-Que faut-il que je Commence à faire ?
-Que faut-il que j’Arrête de faire ?
Mettre en pratique un management par objectif
Le management par objectif suppose d’une part, que tout manager (du DG à l’agent de maîtrise), ait des objectifs formalisés et déclinés. D’autre part, chaque manager est responsable des résultats de son activité (c’est à lui seul, de contrôler ce qu’il fait pour atteindre ses objectifs).
Une démarche gagnant-gagnant. Côté collaborateurs, le management par objectif implique et responsabilise : chacun est autonome et auto-contrôle son travail. L’engagement se trouve renforcé par des objectifs fixés d’un commun accord. Le sens au travail est aussi plus fort, car je perçois ma contribution concrète à la stratégie de l’entreprise.
Côté managers, le management par objectif permet un meilleur pilotage grâce à une planification plus précise du travail, la mise en place des tableaux de bord pour suivre les indicateurs clés d’avancement des objectifs. Il renforce le dialogue managérial puisque les attentes sont traduites en objectifs mesurables et que les délégations sont claires.
Manager par objectif permet de faire grandir et monter en compétences les collaborateurs pour qu’ils accèdent à des fonctions supérieures, surtout si on intègre le volet comportemental.
Les étapes à suivre. Convaincu.e ? Voici des repères pour savoir par quoi commencer.
Étape 1 : convaincre la Direction car c’est une démarche assez top down dans son initialisation. À FAIRE : décliner les axes stratégiques en objectifs opérationnels et sous-objectifs dans chaque équipe. Les objectifs doivent être Spécifiques Mesurables Atteignables Réalistes et Temporellement définis (SMART). À noter : un objectif n’est ni une mission, ni un rôle dans l’organisation.
Étape 2 : réfléchir aux moyens et à la meilleure façon de piloter. À FAIRE : s’intéresser aux compétences et outils nécessaires, définir des indicateurs de mesure et le reporting appropriés aux enjeux, attribuer les objectifs selon le niveau d’expérience et d’autonomie dans l’équipe.
Étape 3 : partager les objectifs, les moyens et le reporting avec chaque collaborateur. À FAIRE : garder en tête que le développement à moyen-long terme du collaborateur est en jeu. Évitez l’instrumentalisation. La discussion portera notamment sur le caractère atteignable des objectifs (à quelles conditions, avec quels moyens). Elle permettra de se mettre d’accord sur les priorités.
Étape 4 : suivre puis évaluer. À FAIRE : se mettre d’accord, au fil de l’eau, pour réviser les objectifs si besoin. Mettre en place des moyens supplémentaires en cas de difficulté. C’est au collaborateur de progressivement proposer des solutions à ses problèmes. L’évaluation est simplifiée par la mise en place d’un suivi efficace.
Des limites pourtant
Cette approche peut être considérée comme lourde à mettre en place, voire mise à mal par l’accélération des transformations et le développement des projets « agile » (dans ces projets, des équipes pluridisciplinaires travaillent de façon synchronisée sur un même objectif en cycles courts, avec une certaine autonomie ; voir article de Courrier Cadres d'octobre 2020, bit.ly/38WcWkk). Par ailleurs, ce modèle de management va de pair avec l’entretien annuel, auxquels certains reprochent lourdeur et manque de réactivité par rapport à la vitesse des changements à engager en entreprise.
Certains managers trouvent un espace pour imaginer des objectifs agiles, connectés à la stratégie sans attendre une déclinaison parfaite et attendent de leurs collaborateurs qu’ils les proposent pour optimiser leur appropriation.
Les confinements ont permis, au travers d’un management par objectif, d’alimenter le dialogue managérial et de s’assurer de l’engagement des collaborateurs à distance au travers d’un intérêt certain pour leur développement personnel. Une facette du management que nous aborderons bientôt.
L'auteur
Sandrine Caillé, fondatrice de Human Transfo, accompagne les changements individuels et collectifs et rend accessible la complexité humaine. Consultante depuis 22 ans, elle permet d’atteindre les enjeux business en focalisant l’attention sur les comportements indispensables. Son approche du changement consiste à mobiliser à tous les niveaux hiérarchiques (https://human-transfo.com/).
Les opinions et positions émises dans cette rubrique n'engagent que leur auteur.