Management
Bien manager la diversité
Une étude de Deloitte de janvier 2020 précise que 80 % des DRH et des dirigeants considèrent la diversité et l’inclusion comme un avantage compétitif. D’ailleurs les grandes entreprises nomment de plus en plus des personnes en charge de ces sujets au sein des directions des ressources humaines. Pourtant, manager la diversité ne va pas de soi et suppose finesse et ouverture.
De quoi parle-t-on ?
Le thème de la diversité est d’actualité dans les entreprises dans un mouvement général de Responsabilité Sociétale des Entreprises qui vise la prise en compte des enjeux environnementaux, sociaux, économiques et éthiques dans leurs activités en lien avec le développement durable. Ainsi, selon la norme ISO 26 000, une entreprise qui adopte une démarche RSE développe des actions sociales et respecte les droits humains. Concrètement, cela implique d’inclure les différents publics et d’éviter la discrimination, qu’elle soit de genre, de sexe, d’origine sociale ou culturelle, de santé, etc. De ce fait, la question du leadership ou du management inclusif est apparue. C’est un sujet complexe, qui a des impacts sur des process RH tels que le recrutement et les promotions, mais aussi la fixation d’objectifs et donc plus globalement sur le management.
L’un des principaux enjeux de la diversité est de sensibiliser les managers aux risques de stigmatisation voire de discrimination vis-à-vis de certaines catégories (notamment les femmes et les personnes en situation de handicap) (voir encadré).
Cette thématique peut pourtant vite devenir émotionnelle. Que penser de l’écriture inclusive par exemple ? Imaginée pour mieux intégrer la diversité, elle peut être considérée comme engagée et presque militante et être alors rejetée car trop revendicatrice et donc communautaire. L’inclusion devrait pourtant n'être ni du communautarisme (repli sur soi, conflits) ni de l’assimilation (déni de soi et conformisme).
Question de vocabulaire
Le stéréotype est un ensemble d’attributs (caractéristiques) associés à une catégorie de personnes qui se ressemblent. Le préjugé est une croyance ou un jugement associé à un stéréotype. Il peut être positif, négatif ou neutre. La discrimination est la mise en pratique d’un préjugé.
Pourquoi manager la diversité est si exigeant ?
Sur le papier, tout le monde est prêt à considérer que la diversité crée de la valeur, de la performance voire de l’innovation. Pourtant en réalité tout dépend comment cette diversité est managée. Car la diversité apporte surtout de la différence et donc de la méfiance, des incompréhensions, de la peur voire du rejet et surtout potentiellement du conflit du fait des angles d’observation qui sont très différents.
Prenons l’exemple d’un projet qui réunit tous les meilleurs experts. Cette diversité de compétences peut devenir une source de performance et d’efficacité incroyable ou très vite être insupportable. Tout dépend de l’état d’esprit et des comportements que l’on peut observer. Imaginez comme le débat très technique peut durer des heures car personne n’arrive à coordonner une juxtaposition de convictions tout à fait intelligentes mais sans passerelles les unes avec les autres. Au contraire, si le groupe apprend à faire de ses différences une force, chacun joue la complémentarité, partage son point de vue sur le sujet en posant des questions aux autres sur les dimensions qu’il ne connaît pas.
À noter
L’efficacité collective s’éduque au travers des comportements d’écoute active notamment et aussi de la capacité à exprimer son avis sous forme de point de vue et non de certitudes absolues, totalitaires et enfermantes.
Cependant parler des comportements à adopter dans une équipe diverse ou pluridisciplinaire sans parler des émotions en situation serait totalement réducteur. C’est pourquoi la diversité sur le papier cela fonctionne admirablement bien, et dans la vraie vie cela peut vite devenir le chaos. En effet, en lisant ces exemples vous trouvez probablement la conduite à tenir évidente, pourtant dans le feu de l’action rien ne garantit que vous adopteriez les comportements appropriés… Tout cela à cause de nos émotions, des représentations que l’on se fait de la réalité ou de ce que l’on attribue aux autres, et aussi de certains biais cognitifs (fondés sur des normes sociales et des stéréotypes) qui nous font émettre des jugements ou prendre de mauvaises décisions.
À Faire. Organiser la communication et limiter l’impact des préjugés de quelque nature qu’ils soient. Encourager l’ouverture et la compréhension de l’autre, par exemple au travers de « vis ma vie ». Faire la chasse aux biais cognitifs. Encourager un état d’esprit d’ouverture plutôt que le repli sur soi. Faire prendre conscience de la richesse des différences au travers de la complémentarité et de l’intelligence collective pour sortir l’autre de la peur. Faire discuter les désaccords au travers de points de vue sur la situation, dans une logique d’enrichissement mutuel et de recherche de compromis ou de solutions qui maximisent l’efficacité globale.
Développer l'adaptation, cultiver les différences
Pourquoi certaines entreprises recrutent en priorité tels ou tels diplômés, choisissent des clones ,lorsque d’autres favorisent la mixité, la diversité en tous genres ? Choisir des personnes qui se ressemblent correspond à une sorte de facilité : en côtoyant les mêmes écoles et en baignant dans le même bain social cela donne le sentiment que l’on peut se comprendre sans à peine se parler. Est-ce souhaitable ? Quels risques à ne pas se renouveler ? Les différences existeront toujours, quand elles ne sont pas de genre ou de culture, elles peuvent être générationnelles. À côtoyer des personnes qui nous ressemblent trop on ne se renouvelle pas, on fait un peu plus de la même chose alors que l’environnement change. Ce sont nos capacités d’adaptation qui sont à risque, notre résilience au travail. Plus on est en décalage avec son temps, plus on prend le risque d’être en décalage avec son marché et de décrocher.
Comment faire pour manager la diversité ?
La première étape consiste à faire prendre conscience de la richesse des différences. Décloisonner. Quand on s’intéresse à des outils comme le DISC (voir RF Social 230, « Êtes-vous un manager moderne ? ») on comprend vite que dans une équipe il faut des créatifs-relationnels (influence) mais aussi des décideurs qui passent à l’action (dominance), des personnes qui structurent et mettent en place des process qui permettent de gérer en qualité jusqu’au moindre détail (conformité) et enfin des garants d’une certaine qualité de vie par beaucoup d’empathie et de la continuité dans l’action ainsi que la persévérance dans l’effort (stabilité). Manager une telle équipe plurielle demande un management adaptatif car les besoins de l’un ne sont pas forcément les besoins de l’autre. La diversité suppose connaissance de soi et adaptation.
Pour aller plus loin et limiter les risques du conflit (le désaccord est normal et peut être source d’efficacité), il faut s’intéresser aux moteurs des comportements. Qu’est-ce qui nous pousse à agir ? Qu’est-ce qui fait qu’avec certaines personnes c’est souvent compliqué de fonctionner ? Prenons la connaissance : certains ont plutôt un rapport « intellectuel » à la connaissance qui signifie une soif d’apprendre au travers des livres notamment tandis que d’autres ont un rapport à la connaissance inspiré principalement de leur expérience. S’ils doivent travailler ensemble sur un nouveau sujet cela peut vite devenir compliqué car le référentiel de l’un n'accorde aucune valeur au référentiel de l’autre. Sauf, un gros travail de prise en compte de ces différences, il en découlera des comportements peu compatibles avec une collaboration efficace : défiance, haussement de sourcils, pensées de type « il ne comprend rien, ça ne marche pas comme ça »… (illustration basée sur les travaux du philosophe et psychologue Sprangler sur les 6 attitudes).
À FAIRE
-Accepter l'idée que l’on est tous différents et que la différence est un plus est non un moins.
-S’intéresser à l’autre, à sa vision des choses est un pré-requis.
-S’observer dans ses réactions, ses comportements, ses pensées et ressentis est absolument indispensable pour prendre du recul et pouvoir faire un pas de côté pour accueillir l’autre dans sa/ses différences.
-Recadrer les comportements discriminants et ceux qui manquent de bienveillance.
-Essayer de s’améliorer en permanence, s’ouvrir aux autres, à ce qu’ils ont de différent.
Bientôt les vacances, une belle opportunité de faire des choses très différentes de ce que l’on fait le reste de l’année, de s’ouvrir à de nouvelles découvertes de personnes, de lieux, de langues ou d’activités. Et si jamais pour vous les vacances c’est comme d’habitude ou comment s’installer dans une nouvelle routine, il est peut-être temps de réfléchir à comment vous remettre dans une logique de nouveauté et d’adaptation à partir de la rentrée… Belles vacances à tous et qu’elles vous apportent beaucoup de joie et de sérénité.
Source : Étude Deloitte « Diversité et inclusion », janvier 2020